• LE REGARD DES AUTRES

     

    À ce jour chaque regard

    Posé sur nous nous fait frémir

    Ce jeu d’yeux est un cauchemar

    Un peu d’intimité pourrait nous suffire.

    La mode est un impératif d’adolescent

    Qui s’en démarque gagne de supplémentaires

    Regards désapprobateurs et impudents

    Conditionnés sans rien pouvoir faire

    Nous suivons le berger la tête basse

    Soucieux de notre image comme de notre vie

    Et les chiens qui jamais ne se lassent

    D’aboyer sous notre nez d’un air réjoui.

    Parfois même ils nous dévorent

    Ne laissant que la tête, pour que malgré tout

    Nous continuions à souffrir encore

    De notre statut d’imbécile et de fou

    Nous qui avons ouvert la boîte

    Et gentiment montré notre caractère

    Mais les chiens sans honte nous exploitent

    La bave aux lèvres nous font manger la terre

    Les moutons noirs sont nombreux

    Mais ils savent habilement se déguiser

    D’autres se dévoilent à leurs yeux haineux

    Et sans ménagement se font écraser.

    Le berger ne dit rien, il regarde

    En silence ses bêtes vivre ou survivre

    Fier et satisfait de ses chiens de garde

    Les moutons bientôt ne voudront plus le suivre.


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  • 1. Une journée particulière

     

    — Il a été ouvert ! Il a été ouvert !

    — Qu’est ce qui a été ouvert ?

    Ça s’était passé comme dans un film. Une vieille dame descendait en courant la rue de Feltre, et hurlait cette phrase en boucle. Ses longs cheveux blancs s’éparpillaient autour de son visage et ses yeux étaient exorbités, on aurait dit le docteur Emmett Brown. Prudence tenait son grand carton à dessins sous le bras et peinait à marcher sans se le prendre dans le flanc. Elle était dégoûtée d’avoir fait un long détour afin de se rendre chez H&M acheter un jeans, pour au final ne pas en trouver. Mais voilà que cette vieille femme venait troubler la tranquillité du centre ville en hurlant à qui voulait l’entendre que ce quelque chose avait été ouvert. La plupart des gens qui se trouvaient là la regardaient d’un air amusé, comme si derrière leurs têtes maquillées et impeccablement coiffées, ils se disaient : « En voilà une qui pense qu’on est le jour d’Halloween ». Prudence, elle, s’était arrêtée au milieu du trottoir. Elle avait vu un homme, très grand, saisir le bras de la femme et lui poser cette question évidente, celle que tout le monde se posait derrière ces mêmes têtes coiffées et maquillées. Et la femme le dévisageait en tremblant. Elle semblait réellement terrorisée.

    — Le tombeau… murmura-t-elle d’un ton énigmatique.

    L’homme ne répondit pas, du moins pas de ce que Prudence put entendre. Il se pencha à l’oreille de la vieille femme, puis s’éloigna d’un pas raide, ses cheveux noirs lui tombant dans les yeux. La femme reprit sa course, mais sans crier. Elle ne semblait plus vouloir répandre la nouvelle mais plutôt s’enfuir d’ici.

    Les promeneurs reprirent leur marche en souriant toujours; Prudence fit de même. L’amusement avait fini par la gagner. Il y a des gens qui créent des codes que seuls quelques érudits peuvent comprendre. Le sosie d’Emmett Brown et cet homme aux allures de Severus Rogue faisaient sûrement partie de ces gens-là. Prudence aimait les choses qu’elle ne comprenait pas. Parce qu’elle avait la possibilité de résoudre leurs énigmes. Et elle aimait les choses qui troublaient le quotidien, parce que le quotidien lui apparaissait si monotone. Son carton toujours sous le bras, elle descendit la rue de Feltre, puis longea le tram sans monter dedans. Malgré l’encombrement de son grand carton, elle aimait marcher le long de la Loire et regarder les bateaux passer, à la recherche d’un modèle, peut-être, ou d’une rencontre.

    Arrivée à Saint Mihiel, elle ne put résister à la tentation de croquer cette jolie péniche jaune vif, et s’assit sur les dalles en pierre dont l’irrégularité permettait à quelques touffes d’herbe de s’épanouir. Elle sortit une feuille du carton, un crayon de la grande poche de sa parka, et esquissa les contours de la péniche. Son crayon se baladait presque avec autonomie sur le papier. Il répondait à sa moindre demande, au moindre geste, il ne faisait qu’un avec son cerveau, comme s ‘ils avaient fusionnés à travers son bras.

    Elle resta là, bercée par l’eau, pendant de longues minutes. Lorsqu’elle eut fini son esquisse, elle ajouta quelques annotations afin d’appliquer la couleur une fois rentrée chez elle. « Bleu gris » pour l’eau, « jaune vif » pour la péniche, « gris - beige » pour le sol. Elle fouilla ses poches à la recherche d’une gomme — pour effacer les quelques imperfections qu’elle était la seule à remarquer — et en fit tomber une petite pierre. Elle la récupéra précautionneusement et l’observa. Cette petite pierre avait semblé l’attendre dans une rue non loin de l’école des Beaux-Arts. Dans un coin, entre deux maisons, elle avait brillé de son éclat bleu et Prudence n’avait pas pu résister à la tentation de la ramasser. Elle faisait la taille de son pouce, et brillait presque autant qu’une luciole. Du bout des doigts, Prudence caressait les arabesques grises et noires qui formaient de l’écume sur toute sa surface.

    — Bonjour.


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  • Souvenirs de mes vacances en Toscane ^^

     

    CAMPAGNE TOSCANE

     

    Parmi les senteurs campagnardes

    Le silence solennel des champs fraîchement labourés

    Seulement troublé par l’aboiement des chiens de garde

    Repose tranquillement une tour rénovée.

    Au premier regard on trouve deux joyeux sourires

    Chaleureux et tranquilles, ils semblent vivre en paix

    Et s’aiment force de disputes, force de soupirs.

    Ils parlent la langue, ils sont pourtant français !

    A leurs jambes se frottent des ombres noires

    Des félins affamés soudain affectueux

    Ne pointent leur museau que lorsque vient le soir

    Et une fois comblés, remercient d’un rron rron heureux.

     

    Les jours tranquillement coulent

    Sur mon corps, dans un calme apaisant

    Loin de tout, de l’Homme et de la foule

     

    J’aimerai la campagne à vingt comme à cent ans.


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  • Un an a passé

    L’automne est revenu

    Une vie collante s’est attachée à moi.

    Ne vivant plus d’amour,

    Ne vivant plus de rien,

    Je me lasse et me traîne.

    Mon cœur a refermé ses portes

    Sur un sinistre tableau de feu

    Il ne laissera plus entrer quiconque.

     

    Une douceur cependant

    A réussi à s’infiltrer au sein de mon âme

    Comblant mes passions d’un simple regard

    Moi qui fus devenue patiente

    J’ai trop longtemps résisté

    Jusqu’à ce qu’un rapace emporte ma proie sous mes yeux.

    Et maintenant,

    Les yeux fixés sur sa nuque charmante,

    Je me maudis.

    Je ne pense plus avec mon cœur

    Je pense avec mon âme.

    Un bouclier froid a achevé de me tenir à l’écart.

    Ouverte de l’extérieur

    Close de l’intérieur

    Je joue de miroirs.

     

    Si seulement...

    Si seulement un jour

    L’un avait répondu à mon appel

    Si seulement j’avais

    Mûri un peu plus tôt

    Si seulement ma vie

    N’était pas de glace.

     

    Le façonnage de mon bouclier achevé,

    J’ai pu vivre entourée d’un étonnant calme

    La sagesse ancrée en moi,

    Les regards pétillant enfin

    J’ai recouvré ma liberté.

     

    Mais le froid s’est insinué en moi

    Il s’est attaché à ma peau,

    M’a rendue grelottante

    Comme un vent d’hiver qui pénètre les vêtements.

    Ce froid a pénétré mes os

    Il a pénétré ma chair

    Il a pénétré mon âme

    M’a rendue de glace

    M’a craché au visage

    Cette haine contenue

    Jouant avec mes peines

    Jouant avec mon corps.

     

    Je suis rongée de l’intérieur

    Par ma haine du genre humain

    Tant de souffrances en si peu d’années

    Tant de questions dans un si frêle corps

    Manipulée par mes démons

    Je suis.

    Je suis telle un chien suivant son maître.

    Je suis telle une femme suivant la mode.

    Je suis telle un mouton suivant son berger.

    Je suis.

    Je suis le genre humain

    Son égoïsme, ses pensées

    Ses rires et ses querelles.

    Je ris comme eux

    Je parle comme eux

    Je vis comme eux

    Malgré tous mes cris de désespoir

    Mes freins poussés à bout

    Je suis, et le dois

    Car pour survivre en ce monde

    Penser n’est pas l’atout idéal.

     

    J’avais trouvé le parfait amour.

    Celui qui ne fait pas souffrir le cœur.

    L’amour subtil et pénétrant

    L’amour juteux et fin.

    Celui qui bloque le souffle

    Qui procure d’imperceptibles frémissements.

    Il est toujours présent, quelque part.

    Chaque cicatrice a son histoire.

    Lorsque je Le vois dans la rue

    Ma plaie toute fraîche se déchire

    Mes pensées se déchaînent.

    Mais cet amour-là est bien révolu.

    Ce fut une passion d’adolescente

    Une passion fougueuse et imprévisible.

    Mon corps appartient désormais à la candeur pure

    À la douceur même

    J’ai nommé;

    Celui qui a valsé avec une autre tandis que le goût amer de la déception emplissait ma bouche

    Celui qui se penche délicatement vers son interlocuteur,

    Les sourcils froncés, l’oreille attentive

    Celui qui représente à lui seul la gentillesse, la bonhomie et la paix.

    Celui qui est simple. Sa simplicité le rend beau.

    À chaque battement de mes cils, il m’apparaît plus sage.

    Je te souhaite tout le bonheur du monde.

    Reste l’adorable homme que tu es

    Peu importe qui te tiendra la main.

     

    Ses cheveux coupés courts

    D’une jolie couleur brune

    Son teint de pêche

    Ses membres de pantin voûté

    Ses gestes sûrs et bienveillants

    Ses sourcils froncés

    Son oreille attentive

    Ses doux mouvements de tête

    Son long cou rose et tendu

    Ses yeux profonds

    Son regard pénétrant

    Sa parole au bord des lèvres

    Sa prononciation brumeuse

    Sa voix tout juste grave et bourdonnante

    Son front ample et plissé.

    Dans le trio des exquis jeunes mâles,

    Il est la peluche,

    Mon préféré.

    Si je devais dire à quel point il me semble parfait

    Les plus subtils mots ne me feraient pas taire.

    Mais sa perfection me laisse de marbre,

    Le dévorant seulement des yeux,

    Je ne m’enflamme qu’en face des impuretés.

    Car il est pur,

    Candide,

    C’est un enfant dans un corps d’homme

    Bien qu’il soit si mûr.

    Son sourire me fait fondre,

    Son rire me heurte l’âme.

    Je me délecte de sa vision :

    Dans mon idéal ce fut moi qu’il entourait de son amour

    En exaltation dans les bras de Morphée,

    Je me refusais à soulever les paupières

    Et à combattre la réalité de front.

    Bien que l’espoir fasse vivre,

     

    Il ne rassasie point.

     


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  • J'ai écrit cette chanson à l'occasion du concours Coin aux étoiles sur le thème "Les conditions de vie des artistes", et j'ai été ravie d'apprendre que mon texte a été retenu en 4ème place, comme prix d'encouragement spécial moins de 18 ans !

    ARTISTE, QUI ES-TU ?

    Froides sueurs dégoulinant sur l'échine
    À maigrir à vue d’œil sous une pression invisible
    C'est vers un gouffre sans fin qu'à pas lents on chemine Seuls dans ce calvaire aussi délicieux qu'irrésistible.

    On peine à trouver le clic qui démarrera la machine
    Dans ce chantier qu'est notre âme la sortie est inaccessible On suffoque ; l'art imperceptiblement nous discrimine Dans ce délire de passion notre souffle nous est nuisible.

    Qui es-tu ?
    Toi au visage si pâle, aux mains écorchées par le labeur D'un travail jouissif, d'un art si merveilleux
    Qui es-tu, toi, l'artiste,
    Pourquoi me regardes-tu de ces yeux fous ? Cherches-tu donc en moi le scintillement de la création ?

    On a peur de l'échec, pire frayeur de l'artiste
    On court les rues à la recherche de notre vérité
    On se perd, se trouve, on mendie d'un regard fataliste Notre fortune et notre vie dépendent de cette liberté

    Une liberté de sortir des règles d'une société capitaliste D'exprimer les profondeurs d'une âme tourmentée
    Au fond de nous, ce scintillement résiste
    On cherche ainsi la main qui nous hissera jusqu'à notre apogée.

    Qui es-tu ?
    Toi au visage si pâle, aux mains écorchées par le labeur D'un travail jouissif, d'un art si merveilleux
    Qui es-tu, toi, l'artiste,
    Pourquoi me regardes-tu de ces yeux fous ? Cherches-tu donc en moi le scintillement de la création ?

    Incompris, tourmentés, ignorés, détruits
    Nos messages d'amour ne parviennent guère jusqu'aux cœurs La branche de l'art n'a pas éclos sans bruit
    Les critiques pleuvent sur ces désireux de bousculer les mœurs.

    Mangerai-je demain ? Chacun attend un oui
    Le marketing a remplacé l'art charnel comme un empoisonneur Il tue à petit feu la beauté passionnelle de l'oeuvre qui reluit Les véritables aimants protestent tous d'un même choeur.

    Qui es-tu ?
    Toi au visage si pâle, aux mains écorchées par le labeur

     

    D'un travail jouissif, d'un art si merveilleux
    Qui es-tu, toi, l'artiste,
    Pourquoi me regardes-tu de ces yeux fous ? Cherches-tu donc en moi le scintillement de la création ?

    Pourtant au sein de nos villes, brûlante vit la passion
    Certains aveugles l'évitent inconsciemment, d'autres l'écoutent en la suivant Et on entend soudain battre leurs cœurs à l'unisson
    Et les rires des âmes comblées éparpillés au vent.

    Une fois leur âme égarée pendue à notre hameçon
    Nous éveillons leurs sens et libérons leur inconscient
    On vous ouvre, mortels, à la vie, cruelle dégustation
    De votre magnificence dissimulée à nos yeux impudents. 


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